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Une chatte nommée Vava

Temps de lecture estimé : 5mins

Lundi 15 janvier, 20h38. Rendez-vous Skype fixé. Le jour est tombé, Vava Dudu se réveille, l’oeil égyptien, souligné de bleu et je m’étonne presque de l’entendre parler, presque déçue de ne pas entendre de cri de chat hurlant, huant, miaou…

Moi qui avais passé la journée à écouter La Chatte, oui, La Chatte c’est aussi un groupe de musique où Vava déploie ses griffes vocales aux côtés de Stéphane ArgilletNicolas Jorio (Nikolu). A revoir des clips de Björk et Lady Gaga pour lesquelles Vava Dudu a inventé des costumes aussi inspirés que leurs modèles. Elle réalise aussi ses propres vêtements qu’elle construit à partir d’éléments et d’objets récupérés pour en proposer des pièces sculpturales poético-punk.

Et, après une exposition “Vertige Profonde” au Salon du Salon, dirigé par Philippe Munda, suit un portfolio éponyme composé de 38 dessins originaux, réalisés en rizographie, où la délicatesse et la pureté de la ligne se disputent les désirs chromatiques infinis de Vava.

Impossible de décrire et recenser tous les terrains de jeux de Vava, et tant mieux, car elle repousse les limites de chaque discipline.

Et Vava, c’est qui?

Si tu étais un vêtement ?
Des cuissardes.

Si tu étais une couleur?
Rouge.

Si tu étais un tissu?
De la soie.

Si tu étais une chanson ?
“J’ai la mémoire qui flanche”… 

Tes références artistiques?
Quand j’étais adolescente, j’adorais Arman, César. Mais d’abord il y a eu Sonia Delaunay pour son côté pluridisciplinaire : le dessin, le vêtement, la peinture…

Et au musée du Louvre (nda: Vava était une visiteuse assidue), qu’allais-tu voir?
J’allais voir les antiquités égyptiennes et les christs peints. J’aime beaucoup l’Egypte, l’idée des hiéroglyphes, les pyramides, j’ai vu l’expo Néfértiti à Berlin, et puis tout ce que ça implique, Cléôpatre, les fondations… C’était quand même une civilisation très avancée, très intéressante. J’aime bien l’architecture et les dessins, l’écriture, les vêtements et puis toute l’histoire qui va avec. 

Et la photographie?
Je fais de la photographie tout le temps. Je pense que par appareil: Ipad, Iphone…, j’ai environ 6000 photos. J’ai aussi encore plein de boîtes pas développées. J’en faisais déjà adolescente.
Aujourd’hui, je fais des photos au quotidien. Sur Instagram, j’aime bien donner une indication de ce que je suis en train de vivre, en train de créer, par rapport à mes, moods. Comme tout ce que je fais, c’est souvent par rapport à mes envies, mes humeurs. Les photos, ça peut être tout et n’importe quoi, quelque chose dans un égoût, des photos de charme, de camion, j’adore les camions. Quand j’étais à Berlin, le café où j’allais le matin, il y avait énormément de camions qui passaient. C’est surtout des photos du quotidien mais comme j’ai tout de même un certain oeil, un certain cadre. J’aime les photos rapides pas trop mises en scènes. Il faut que ça aille vite.
J’ai envie de prendre des photos quand je vois quelque chose qui m’interpelle. La ligne, c’est quelque chose qui me fait réagir, des lignes qui s’entrechoquent, qui sont intéressantes, des couleurs. Je suis plutôt positive, donc ce que je préfère montrer, ce sont les choses positives en ce moment et aller vers la beauté.

Des dessinateurs que tu affectionnes?
J’adorais Cabu quand j’étais petite. Ce qu’il y a d’intéressant avec lui, c’est que c’est un dessin pertinent pour les enfants comme pour les adultes. En une ligne, il a raconté déjà tout un tas de choses. J’adore l’idée de faire passer un message en une seule ligne. J’aime bien l’instantané. En tout cas pour l’instant, j’aime pas trop développer les choses pendant trois plombes. Après, c’est une vie, l’expérience d’une vie qui fait qu’on est capable de faire une ligne en une seconde. Enfant, je faisais beaucoup de pages d’écriture.
J’ai aussi pris beaucoup de cours de dessin, de croquis quand j’étais adolescente. Je dessinais beaucoup de mon côté et je n’ai jamais arrêté contrairement à la plupart des gens. Tout enfant dessine mais après quand on devient adulte, on apprend à lire, à écrire et après on laisse tomber, ça devient un truc pas sérieux. Moi, j’ai continué. 

Tu dessines, crée des vêtements, écris, photographie, chante… qu’est-ce qui détermine le mode d’expression?
Je peux être très très calme dans un univers presque sans personne et j’aime bien passer carrément à l’opposé, au grand foutraque. Quand j’ai assez dessiné, par exemple ou brodé des vêtement, enfermée parfois pendant plusieurs jours, c’est sympa d’aller jouer quelque part. C’est une façon de communiquer avec les gens dehors, d’une façon festive. C’est sympa de voir des gens qui prennent du plaisir quand je joue. J’adore faire de la scène. 

L’avenir?
Avec La Chatte, on va faire un six titres, un vinyle.
Après, c’est développer les sculptures, les tatouages.
Continuer à écrire et à jouer à droite, à gauche; des grands formats en peinture.
J’aime pas m’ennuyer, j’étais une enfant unique jusqu’à ce que ma soeur naisse. J’aime bien développer quelque chose que j’ai en tête, j’aime bien être en activité. 

Tu rêves à quoi?
Je rêve que je vole avec des ailes dans une ambiance très chaleureuse. Il y a du soleil. Je fais une perruque de mots, de cheveux en tee-shirt tressés de mots, je l’ai en tête, je vais le faire. Des fois, je rêve de pièces, de choses à faire et parfois, je les réalise. 

21heures et je ne sais plus… Vava s’en va. Le rêve se dissipe. Dernière oeillade. Ecran noir. Je vois rouge. Désir.

http://www.editionsdusalon.com/061-vertige-profonde_vava-dudu_portfolio.htm#
http://www.salondusalon.com
https://www.instagram.com/vava.dudu/

Selma Bella Zarhloul
Après une double formation en Information et Communication à la Sorbonne et histoire de l’art à l’Ecole du Louvre, elle choisit de se consacrer à la photographie. D’abord, en tant que praticienne afin de bien comprendre et maîtriser les spécificités du médium pour pouvoir s’exprimer avec. Parallèlement, en 2001, elle rejoint la Donation Henri Lartigue, sous tutelle du Ministère français de la Culture. Pendant plus de 10 ans, elle contribue au développement, assurant la production et la distribution de la collection à travers le monde. En 2017, elle commence à travailler en tant qu’ indépendante endossant plusieurs casquettes : commissaire d’exposition, critique d’art et cheffe de projet spécialisée dans la photographie contemporaine. Entre autres, elle assure le rôle d’administratrice générale du Festival Voies Off à Arles en 2018-2019. En 2021, sa passion pour la photographie contemporaine la pousse à ouvrir La Volante à Arles, une galerie d’art dédiée à la photographie et autres arts.

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