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Rencontre avec Ferit Düzyol, Directeur artistique du Photo Festival – Baie de Saint-Brieuc

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Le Photo Festival – Baie de Saint-Brieuc renaît de ses cendres. Cette huitième édition est synonyme de changement, un nouveau nom, un nouveau directeur artistique, et une nouvelle philosophie. Nous avons rencontré Ferit Düzyol pour nous parler de la manifestation en pleine préparation pour son ouverture ce week-end !

9 Lives Magazine : Ce week-end s’ouvre la 8ème édition du Photo Festival Baie de Saint Brieuc. Cette année marque un renouveau, avec le changement de nom et votre arrivée à la tête de la direction artistique. Pouvez-vous nous présenter cette nouvelle formule ?

Ferit Düzyol : La manifestation existe depuis 2012 sous le nom du Festival Photoreporter en Baie de Saint-Brieuc. Les fondateurs étaient venus me consulter pour avoir un retour de professionnel, j’avais soumis l’idée de proposer des bourses pour que les photojournalistes et photographes documentaires puissent financer leurs sujets, compte tenu de la baisse des commandes et des tarifs. Cela avait pour but dans un premier temps d’attirer les photographes, puis de se démarquer des autres festivals existants. Donc, dès l’origine, les photographes exposés au festival étaient choisis sur un appel à projet et percevaient des bourses entre 5 et 10.000€. Ils avaient donc le temps de réaliser leurs sujets pour les exposer chaque année au moins d’octobre. Dès le départ, l’ambition était grande, ça a démarré avec des budgets importants provenant à la fois de subventions publiques et privées.
Je leur avais également conseillé le nom d’un directeur artistique, Didier Rapaud, l’ancien rédacteur en chef de Paris Match, et qui était le directeur du festival de Vannes. Pendant 2/3 ans, c’est lui qui a dirigé le festival et qui choisissait les photographes bénéficiant des bourses. Les premières années ont donc été florissantes, les entreprises locales participaient financièrement. En 2017, ils ont rencontré des problèmes d’argent qui les ont plongés dans un déficit important, et l’agglomération de Saint-Brieuc a été contrainte de couvrir les frais. Le créateur Alexandre Solacolu s’est retiré du festival. La question s’est posée de quel avenir pour le festival, et l’agglomération a décidé de continuer mais avec une version moins coûteuse pour l’année 2018, en proposant des expositions déjà produites. Enfin, pour cette édition, la trentaine de communes se sont réunies et ont affirmé leur volonté de créer une manifestation pérenne. On m’a appelé pour en être le directeur artistique. Le temps était court, nous avons donc préféré cette année de ne pas encore lancer d’appel à dossiers. Avec Magdalena Hereira, Présidente du jury et directrice de la photographie au magazine GEO France, nous avons sélectionné une trentaine de sujets pour les proposer au comité de sélection et choisir les 10 expositions.
Il a été décidé de changer le nom du festival, pour la simple et bonne raison qu’il nous semblait important de l’ouvrir à d’autres formes de photographie que le reportage. J’aimerais donner plus d’importance à la photographie documentaire ou à des pratiques plus conceptuelles.

9 Lives Magazine : Quels sont les axes hérités des 7 éditions précédentes ?
F. D. : L’ADN du festival était de montrer le monde dans sa diversité, nous souhaitions être fidèles à cela. Le public retrouvera du photoreportage avec notamment l’exposition « Seulement humains » de Pascal Maitre qui avait été présentée l’an passé dans le grand espace de la grand Arche de la Défense. Mais pour les années à venir nous souhaitons ouvrir les différentes pratiques photographiques…

9 Lives Magazine : Pouvez-vous nous présenter les deux résidences du festival ?

F. D. : En effet, si financièrement, nous ne pouvions décerner de bourses, nous avons pu proposer à deux photographes de participer à une résidence qui s’est déroulée cet été : Florence Levillain a choisi de travailler sur le fonds d’archives Lucien Bailly au Musée d’art et d’Histoire de la Ville de Saint-Brieuc. Et Vianney Le Caer, photographe briochin vivant outre-Manche, a réalisé une série sur les plages de l’agglomération.

9 Lives Magazine : Sur les 10 expositions présentées, on remarque une parfaite parité entre les hommes et les femmes photographes. Etait-ce une volonté de votre part ? 

F. D. : Lorsque nous avons soumis notre sélection au comité, nous avons demandé à ce qu’il y ait une parité parfaite : 5 femmes et 5 hommes. Nous sommes rapidement tombés d’accord sur les 10 sujets sélectionnés avec une égalité entre les genres.
C’était important pour moi, j’ai été sensibilisé à ce problème de sous représentation des femmes photographes, parce que j’ai participé aux premières éditions du festival Les Femmes s’exposent à Houlgate avec Béatrice Tupin. J’étais chargé de la scénographie la première année et cela m’a beaucoup marqué. Aujourd’hui, je fais attention dans mes choix de respecter la parité.
On voulait également donné leur chance à de jeunes photographes, on peut donc voir se côtoyer de grands noms aux côtés de jeunes talents…

 

9 Lives Magazine : La manifestation paye t-elle des droits de représentation aux photographes exposés ?

F. D. : Chaque photographe exposé reçoit des droits de représentation à hauteur de 1500€. Je tenais à ce que nous fassions cet effort. Aujourd’hui, la vie des photographes est de plus en plus difficile, il est aussi de notre rôle en tant que manifestation de les rémunérer. 2019 est une année de transition avant que nous puissions reprendre le système de bourses, là il fallait donc logiquement penser à une rétribution. Sur les anciennes éditions, j’ai été surpris d’apprendre qu’aucune subvention n’avait été demandée aux ministères, au département ou même à la région. Je pense qu’on peut avoir plus de financement que celui de l’agglomération uniquement. J’espère que nous pourrons lancer les bourses rapidement, mais peut être différemment : je préfèrerais qu’il y en ait moins, d’un montant plus important, pour qu’un photographe puisse travailler une année entière sur un projet et que l’on puisse avoir un résultat conséquent. C’est vraiment mon souhait…

9 Lives Magazine : Comment financez-vous cette manifestation ? A l’origine, le festival souhaitait faire appel aux entreprises locales, est-ce toujours le cas ? Quel est le budget du festival ?

F. D. : Nous avons un budget de 100 000€ qui provient exclusivement de l’agglomération Saint-Brieuc. Nous devons trouver de nouveaux financements pour les éditions à venir. Nous essayons de tenir avec ce petit budget. Je sais que d’autres manifestations ont bien plus que nous, mais nous préférons faire les choses correctement avec des choix intelligents.

Retrouvez le programme détaillé du festival :
Sabine Weiss : La Bretagne des années 50 – Les amoureux
Camille Gharbi : Preuves d’amour
Lucie Pastureau : Luminescences
Matt Stuart : All That Life Can Afford
Agnès Pataux : DONSO et SOMA – Afrique de l’Ouest
Pascal Maitre : Seulement Humain
Cyril Abad : IN GOD WE TRUST, voyage au coeur des excentricités de la foi
Éric Pillot : In situ – l’animal
Vianney Le Caer : En résidence / Les baigneurs – Plages de l’agglomération de Saint-Brieuc
Florence Levillain : En résidence / Sur les traces de Lucien Bailly dans l’agglomération de Saint-Brieuc
http://www.photo-festival.org


#payetonexpo :
La manifestation rémunère les droits d’auteur.

#parité :
Volonté de parité dans les expositions à 50/50.


INFORMATIONS PRATIQUES 

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A LIRE :
Bretagne : Festival Photoreporter en Baie de Saint-Brieuc

Ericka Weidmann
Après des études d'Arts Appliqués et de photographie, elle rejoint un magazine en ligne consacré à la photo en tant que directeur artistique, poste qu'elle occupera pendant 10 ans. En 2010, elle s'installe comme DA en indépendant. En parallèle, elle devient responsable éditorial pour Le Journal de la Photographie et c'est en septembre 2013 qu'elle co-fonde le quotidien L’Oeil de la Photographie pour lequel elle est rédactrice en chef jusqu'en septembre 2016 avant de fonder 9 Lives magazine ! Ericka Weidmann est également journaliste pigiste pour d'autres médias.

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