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Partager Partager Temps de lecture estimé : 8minsC’est l’édition le plus ambitieuse jamais proposée qui déplace le centre de Barcelone à sa périphérie (12 villes métropolitaines, 90 participants, 8,9 millions euros) autour d’enjeux majeurs tels que : le surtourisme, l’urgence climatique, l’épuisement des ressources, l’exclusion sociale selon le principe de la biennale itinérante de réagir à un contexte donné pour imaginer des voies alternatives de transformation à travers l’art. Le rôle joué par les femmes catalanes dans des dynamiques de résistance liées au passé textile est particulièrement mis en avant et réactivé par de nombreuses artistes. C’est aussi la dernière édition d’Hedwig Fijen, fondatrice (relire notre interview spécial) qui nous offre une sorte de synthèse de l’ADN de Manifesta. Restos de Sueño [Sleep Remains],2024 © Bea Bonafini. Photo © Manifesta 15 Barcelona Metropolitana / Cecília CocaA la demande de la Mairie de Barcelone de repousser les limites d’investigation contrairement aux éditions précédentes plus concentrées (Pristina, Palerme..), la cartographie pré-biennale dessinée dès l’été 2021 s’est opérée à partir de 3 zones géographiques stratégiques : le Delta de Llobregat, le fleuve Besos et la montagne de Collserola qui irriguent les 3 thématiques générales (clusters) : Balancing conflcts, cure and care, imagining futures. Selon une volonté de commissariat décentralisé et collégial, Hedwig Fijen a nommé 10 collectifs interdisciplinaire (artistes, architectes, philosophes, éducateurs..) et des représentants artistiques de chaque zone métropolitaine. Le siège de Manifesta est l’ancienne maison d’édition de Gustavo Gili, édifice pionnier de l’architecture rationaliste espagnole par les architectes Joaquim Gili et Fracesc Basso où sont proposées les archives de la biennale à partir de modèles d’éducation progressistes qui ont eu lieu en Catalogne « Fora per fer Escola » basés sur la nature comme socle pédagogique. Gustavo Gili, Barcelona. Photo © Manifesta 15 Barcelona Metropolitana | Helena Roig La thématique « équilibrer les conflits » autour de la réserve naturelle du Delta de Llobregat répond au questionnement suivant : Comment préserver l’environnement tout en assurant le développement durable en zone urbaine. La résidence d’inspiration moderniste Casa Gomis, illustre parfaitement les problématiques en jeu. Encerclée et menacée par l’extension de l’aéroport de Barcelone cette résidence privée a été l’épicentre de l’avant-garde catalane. Conçue par l’architecte Antonio Bonnet, un disciple de Le Corbusier et José Luis Sert, entre 1949 et 1963. Au milieu des pins du lagon de La Ricarda en bordure de mer, son toit ondulé et ses ouvertures vitrées offrent un cadre spectaculaire re aux artistes invités, certains se détachant plus. La démarche chorégraphique de Lola Lasurt est particulièrement signifiante à partir du mouvement pionnier naturaliste catalan « Els Amics del Sol » qui se retrouvait sur la plage de Can Tunis, (aujourd’hui remplacée par les docks du port de Barcelone !), pour des exercices de gymnastique inspirés de Isadora et Raymond Duncan. L’artiste Fina Miralles a joué un rôle central dans l’avènement de l’art conceptuel en Catalogne, c’est important qu’elle soit exposée à la Casa Gomis aux côtés d’Ana Mendieta, autre pionnière. Le collectif Embassy of the North Sea a organisé dans la rivière Llobregat, mal connue des Barcelonais alors que son eau leur sert au quotidien, une compétition de pêche contre les espèces invasives comme cela se pratique à Taïwan. Le néon de Enrique Ramirez, artiste chilien, connu des français car basé à Paris et représenté par Michel Rein « Para construir un jardin necesitamos de un trozo de tierra y la eternidad » traduisible par : « Pour construire un jardin il faut un morceau de terre et la éternité » ouvre le champ poétique d’une œuvre visuelle et narrative autour des flux et migrations. L’artiste Felipe Romero Beltràn (Colombie) découvert lors du Festival Circulation (s) se penche, dans la série Dialect, sur le sort d’un groupe de mineurs marocains en attente de régularisation de situation dans un camp d’internement de Séville. Manuel Chavajay à partir de ses origines mayas zutujil explore la richesse de ces traditions confrontées aux conflits armés et aux problèmes environnementaux. Dialect,2020-2023 © Felipe Romero Beltrán. Photo © Manifesta 15 Barcelona Metropolitana / Ivan Erofeev Architecture industrielle à présent avec la ville de Cornellà et l’usine La Caldereria fondée par le groupe Siemens en 1910 investie par l’artiste Katja Novitskova à base d’intelligence artificielle, peu convaincante et surtout la dynamique L’Hospitalet de Llobregat où artistes et centres d’art indépendants se sont établis. L’artiste Lara Schnitger dans une perspective éco-féministe s’est saisie du passé textile de la Catalogne au XIXème siècle pour habiller les nombreuses cheminées du paysage de bannières conçues avec une association de couturières. Les textes ont été pensés à la suite d’ateliers avec les différentes communautés. Un symbole fort de résilience et de lecture inclusive vers l’avenir. Women’s work is Never Done, Banderes per la Gran Barcelona,2024 © Lara Schnitger. Photo © Manifesta 15 Barcelona Metropolitana / Cecília Coca Egalement dans la fabrique textile Can Trixet l’artiste Binta Diaw rejoue l’installation Dïà s p o r a (galerie Cécile Fakhoury, 2022) à partir de grandes tresses de cheveux féminins dessinant dans l’espace des chemins de marronage autrefois utilisés par les esclaves pour tenter de s’échapper. De plus la chevelure cachait des graines pour une possible vie ailleurs. Une résonnance culturelle forte et engagée autour de l’émancipation des femmes. Dïà s p o r a, 2021 -2024 © Binta Diaw. Photo © Manifesta 15 Barcelona Metropolitana / Cecília Coca L’autre grand chapitre (cluster ) « cure and care » explore le pouvoir curatif de l’art, à partir du poumon vert que représente la montagne de Collserola avec pour lieu principal le monastère de San Cugat, épicentre au Xième siècle du pouvoir politique et spirituel. C’est l’un des temps fort de cette biennale avec une sélection d’artistes très aboutie. Dans son cloitre roman l’artiste Martin Toloku propose une performance basée sur l’activation de ses sculptures totems en lien avec l’esprit de ses ancêtres charpentiers au Ghana et son apprentissage du flamenco à Barcelone. La grande tapisserie de l’artiste Fanja Bouts (NL) déroule une sorte de « magna carte » du capitalisme débridé de façon très critique dans un esprit cartoonesque. Temple du soin [Temple of Care],2024 © Marie-Claire Messouma Manlanbien. Photo © Manifesta 15 Barcelona Metropolitana / Cecília CocaLa française Marie-Claire Messouma Manlanbien (exposition Palais de Tokyo en 2023) avec son « Temple du soin » entre en correspondance avec le passé spirituel du monastère dans une célébration autour du pouvoir unificateur de l’eau. La video de l’artiste Diana Policarpo « Liquid Transfers « imagine une fiction dystopique à partir des usages de l’ergot au Moyen-Âge par des guérisseurs et sages femmes pour soulager les douleurs de l’accouchement et pratiquer les avortements avec une survivance moderne dans l’épisode de « l’affaire du pain maudit » survenu en France en 1951 ayant entrainé des hallucinations pour 500 personnes. L’industrie pharmaceutique a toujours tourné le dos à ces remèdes traditionnels. L’artiste sud-africaine Buhlebezwe Siwani qui fait la transition avec la ville de Terrassa où elle est exposée dans l’une des églises, à partir de sa fonction de sangoma – guérisseuse et devineresse spirituelle dans la tradition Nguni. Elle opère un maillage entre les pratiques spirituelles de son pays, l’expérience de la femme noire et les stigmates de l’héritage colonial. Cette grande sculpture suspendue de ceintures en laine suggère les soins prodigués par les ancêtres. La grande inconnue reste de savoir comment le public sera capable de relier les différents sites, les transports publics ne pouvant couvrir un tel territoire, restent le scooter, vélo ou voiture, solution peu écologique. Suite lors de la prochaine chronique, l’ensemble étant très dense… INFOS PRATIQUES : Manifesta 15 Du 8 septembre au 24 novembre 2024, soit 80 jours Weekend de clôture : 23 et 24 novembre 2024 Tarifs : Manifesta 15 aura un prix d’entrée forfaitaire de 15 euros, valable pour toute la durée de la biennale dans les trois principaux lieux d’exposition : Casa Gomis, le Monastère de Sant Cugat et les Trois Cheminées. L’entrée dans tous les autres lieux est gratuite. 4 lieux sont ouverts au public pour la première fois, grâce à Manifesta 15 : Les Trois Cheminées, Casa Gomis, Gustavo Gili et La Caldereria. Programmes complémentaires : Manifesta 15+: un programme additionnel organisé par chaque commune amplifiera l’offre culturelle dans la métropole pour les publics locaux pendant la durée de la biennale. The programme a été pensé et mis en œuvre par les Représentant·e·s artistiques des villes métropolitaines. Focus Weeks : un programme complémentaire de Manifesta qui met en lumière pendant une semaine l’une des villes métropolitaine de Manifesta 15 for a week. Manifesta 15 Barcelona a pour objectif 200 000 visiteurs individuels. https://www.manifesta15.org/participants Egalement en ville : Macba, nouvelle présentation de la collection et expositions de Jordi Colomer et de la pionnière féministe Mari Chordà. https://www.macba.cat/en/exhibitions/macba-collection-prelude-poetic-intention/ CCCB : Suburbia, Building The American Dream https://www.cccb.org/en/exhibitions/file/suburbia/243777 Favori0
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