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Rencontre avec Fred Boucher, co-directeur du Festival des Photaumnales

Temps de lecture estimé : 7mins

La 16ème édition du festival des Photaumnales a été inaugurée ce week-end à Beauvais et sur une grande partie du territoire. La thématique de cette année « Terra nostra -Le temps de l’Anthropocène » est plus que jamais au cœur des attentions. À l’heure où le monde s’engage dans une voie sans issue, 40 photographes sont invités à confronter le regard qu’ils posent sur notre planète. Nous avons rencontré Fred Boucher, co-directeur du Festival.

Quels sont les temps forts de cette nouvelle édition ?

Nouveauté pour cette année, nous avons augmenté notre présence sur le territoire du sud de la grande région des Hauts-de-France.
Le festival a pour but de mettre en avant et de faire rayonner la photographie sur une longue période, puisque la manifestation dure 3 mois. Cela représente une grande visibilité sur notre territoire et nous nous adressons à tous types de public…
Depuis toujours, nous accordons une attention toute particulière à l’accompagnement pédagogique des expositions. Nous avons réalisé un dossier très fourni à destination des enseignants et des visites avec des ateliers pratiques sont proposées au Quadrilatère (Beauvais).
Nous proposons également des visites thématiques liant d’autres disciplines comme la lecture ou la danse, afin d’avoir des transversalités riches autour de l’image.
Il est important aussi de noter les 2 jours de lectures de Portfolio, le vendredi 29 novembre et le samedi 30 novembre, où nous recevons une sélection de personnalités du monde de la photographie, du festival et du réseau Diagonal. Cela permet aux photographes de soumettre leurs travaux aux regards de professionnels.

Y a t-il une (ou plusieurs) découverte(s) que vous avez envie de mettre particulièrement en avant ?

Je ne sais pas si l’on peut parler de découvertes, car beaucoup de photographes sont déjà bien reconnus. J’aime particulièrement le travail de Kai Löffelbein et Henk Wildschut dans le registre documentaire, avec des approches photographiques très différentes.
Ou Jocelyne Alloucherie qui présente les icebergs de manière sculpturale, ou encore Aurore Bagarry qui fait un inventaire des glaciers du massif Alpin…
Il y a bien évidement les photographes que Diaphane soutient depuis longtemps, comme Alexa Brunet, ou encore les photographes accueillis en résidence comme Israel Arino, Morgane Britscher et Margaret Dearing.

Comment se situe cette édition 2019 concernant la parité des photographes exposé.es ?

Chaque année, et depuis longtemps, le festival porte une attention à cette parité que nous jugeons importante, mais malheureusement, nous n’y sommes pas pour cette édition. Je note que sur les 40 photographes programmés par Diaphane, 15 sont des femmes et cela ne va pas du tout

« L’apport de financements par des partenaires privés ou par le mécénat est inexistant, nous ne sommes pas dans une région où l’appétence culturelle donne envie aux décideurs privés de nous accompagner… Du côté de la région, la subvention n’a pas bougé depuis 3 ans. Pour l’instant il n y a pas eu de signe budgétaire fort de leur part, et je le regrette… »

Quel est le budget de fonctionnement des Photaumnales ? Est-il à la hausse, à la baisse ?

Le festival des Photaumnales dispose d’un budget total de 170 000 euros, salaires compris. À notre grand regret, il stagne, nous ne parvenons pas à mobiliser nos collectivités pour l’augmenter. Les villes de Beauvais et Clermont font déjà un gros effort, et ne peuvent pas aller plus loin dans leur soutien.

À mon sens, la Région des Hauts-de-France doit faire un effort sur le financement de notre festival, qui a un véritable rayonnement sur les territoires.

L’apport de financements par des partenaires privés ou par le mécénat est inexistant, nous ne sommes pas dans une région où l’appétence culturelle donne envie aux décideurs privés de nous accompagner…

La région Hauts-de-France s’investit pourtant particulièrement dans la photographie, puisqu’elle inaugure notamment l’Institut de la Photographie le 11 octobre prochain à Lille…

La subvention de fonctionnement de la Région n’a pas bougé depuis 3 ans, nous avons de réels besoins en terme de médiation et pour consolider le festival. Les Photaumnales, par leur situation géographique et leur expertise du territoire, ont un grand rôle à jouer dans une politique régionale, mais hélas pour l’instant il n y a pas eu de signe budgétaire fort de la part de la région, et je le regrette…

Vous nous aviez confié dans une précédente interview, que le festival rémunérait chaque photographe exposé à hauteur de 500 euros. Est-ce important pour vous de rémunérer les photographes ?

C’est une évidence, nous faisons comme nous pouvons, nous versons 500 euros, et si nous gardons l’exposition pour des diffusions ultérieures, nous rémunérons des droits, même dans la présentation des expositions dans les établissements scolaires.

« On paye le théâtre et le cinéma. On paye les intermittents mais pas les photographes ! Le monde de la photographie fonctionne à 2 vitesses. Il y a le marché de l’art et ceux qui vendent en galerie, et les autres, ceux qui y croient encore et qui espèrent un jour vendre leur photos. En fait lorsque vous travaillez en Région, la réalité c’est que c’est la galère! « 

Comment expliquez-vous que le droit de représentation est-il si peu respecté en France ?

C’EST CULTUREL ! On paye le théâtre et le cinéma. On paye les intermittents mais pas les photographes, bien contents d’exposer.
Les lieux font, soit-disant, promotion des photographes c’est bien connu.
Pour un photographe, une expo représente un investissement important : il paye ses tirages, son déplacement, passe une journée à accrocher, et en contrepartie, on lui fait un beau carton d’invitation, il a parfois même droit à une affiche…
Le monde de la photographie fonctionne à 2 vitesses. Il y a le marché de l’art et ceux qui vendent en galerie, et les autres, ceux qui y croient encore et qui espèrent un jour vendre leur photos. En fait lorsque vous travaillez en Région, la réalité c’est que c’est la galère !

Le festival est dans la programmation de la manifestation nationale « Engagement » qui célèbre les 10 ans du Réseau Diagonal dont Diaphane, structure organisatrice des Photaumnales, fait partie. Pouvez-vous nous parler de la nécessité d’avoir rassembler une vingtaines d’organisations culturelles aux quatre coins de la France.

Diagonal, c’est le réseau européen le plus important. Nous travaillons tous à l’aménagement culturel du territoire et à la diffusion de la photographies, nous sommes tous militants et engagés dans un travail de proximité et de médiation.
Nous passons notre temps à persuader les décideurs du bienfondé de notre rôle politique dans l’éducation à l’image par la photographie.
Il faut du temps pour faire passer cela dans un monde de rapidité.
Ce réseau permet aux structures d’être représentées au niveau du ministère et des instances professionnelles.
Ce réseau permet aux photographes de croiser les interlocuteurs qui parlent le même langage, et de monter des projets en commun.
Ce réseau, on aurait pu l’inventer…

Retrouvez le programme détaillé du festival :
https://www.photaumnales.fr


#payetonexpo :
Le Festival rémunère les droits d’auteur.

#parite :
Habituellement respectueux de la parité, cette année, le festival expose 15 femmes sur les 40 photographes programmés


INFORMATIONS PRATIQUES 

sam21sep(sep 21)10 h 00 min2020dim05jan(jan 5)19 h 00 minLes PHOTAUMNALES 2019Le quadrilatère, 22, rue Saint Pierre 60000 Beauvais

ven20sep(sep 20)0 h 00 minsam30nov(nov 30)0 h 00 minL’EngagementPoints de vue du Réseau Diagonal sur l’engagement en photographie OrganisateurDIAGONAL

A LIRE :
Rencontre avec Fred Boucher, Directeur artistique des Photaumnales Comment se portent les « petits » festivals de photographie?

Ericka Weidmann
Après des études d'Arts Appliqués et de photographie, elle rejoint un magazine en ligne consacré à la photo en tant que directeur artistique, poste qu'elle occupera pendant 10 ans. En 2010, elle s'installe comme DA en indépendant. En parallèle, elle devient responsable éditorial pour Le Journal de la Photographie et c'est en septembre 2013 qu'elle co-fonde le quotidien L’Oeil de la Photographie pour lequel elle est rédactrice en chef jusqu'en septembre 2016 avant de fonder 9 Lives magazine ! Ericka Weidmann est également journaliste pigiste pour d'autres médias.

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