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Partager Partager EvénementsPhoto Le scalpel clinique d’Anne Collier au secours de l’épaisseur de l’image Marie-Elisabeth De La Fresnaye1 février 2018 Temps de lecture estimé : 4minsAprès Geert Goiris et Isabelle Le Minh, le Frac Normandie Rouen poursuit son exploration de la photographie contemporaine en organisant la première exposition personnelle de l’artiste américaine Anne Collier. Actuellement visible dans l’exposition parisienne des Galeries des Galeries autour d’une possible mélancolie de la fête, ce sentiment de perte se retrouve dans le parcours conçu par Véronique Souben, directrice du Frac. Formée à la scène conceptuelle californienne des années 1990 et 2000, Anne Collier (née en 19070) se sent l’héritière de John Baldessari ou James Welling, tout en regardant aussi du côté de la Pictures Generation de la côte Est. Elle se saisit de la surreprésentation du corps féminin dans le domaine de la photographie pour interroger la fétichisation du regard et l’instrumentalisation esthétique des émotions, dans une nostalgie pré-digitale. Le parcours sur les 2 étages du Frac s’ouvre sur le motif de l’œil, cher à l’artiste. Allusion aux surréalistes, cet autoportrait via ce motif surdimensionné englobe le spectateur dans un subtil va-et-vient entre le regardeur et le regardé, sous jacent à de nombreux moments du parcours. Ce motif de l’œil se verra mis à mal dans « Cut » directe allusion au film de Bunuel « Le chien andalou » avec cette lame de rasoir difficilement soutenable. Violence de la représentation qu’elle transpose par le biais d’un massicot qui agit comme un couperet. La séquence se poursuit avec la fameuse série des « Women with Cameras » à partir de supports glanés dans des medias des années 1960 80 qu’elle affectionne sous formes de cartes postales, magazines, livres, posters photographiés ensuite en studio. Avec « Women with Cameras #1 et #2 » elle va plus loin et revisite la tradition du nu pictural tout en pointant le caractère sexiste et brutal d’un tel rapprochement machine et corps, qui traverse l’histoire des avant-gardes. Avec « Zoom » elle détourne à nouveau le mécanisme, l’appareil photo allant jusqu’à oblitérer le visage comme avec « Women with Camera (German photography) » à partir des couvertures allemandes des revues Color Foto Journal et Foto Magazin. L’hommage à Cindy Sherman et sa pratique nourrie de stéréotypes lui permet de se mettre dans la lignée de cette Pictures Generation des années 1970 80. Avec « Women With a Camera » l’on assiste à un renversement de pouvoir et de regard. Ainsi des Kodak Girls émancipées des années 70 avec ces campagnes publicitaires simplistes et éminemment sexuées. Des contradictions qui renvoient aux codes du cinéma, comme dans la référence au film d’Ingrid Bergman, Persona. Une approche plus ethnographique avec cette femme en Afrique qui se saisissant de l’appareil, déplace les frontières et rejoue la dialectique dominant-dominé. La question du support revient avec le diaporama et trépied dans une esthétique vintage d’images amateurs. Ces femmes qui jouent et prennent la pose devant leur miroir avec leur appareil traduisent une certaine naïveté et maladresse, d’une ère pré-selfie révolue. A l’étage la nouvelle série des « Woman Crying » surgit dans de grands format qui accentuent l’hyper incarnation de ces modèles. Puisant dans le registre iconographique de la mater dolorosa, l’artiste court-circuite nos attentes à travers les titres des pochettes d’albums à l’encontre d’une vision romantique, comme « Tu fais pleurer les petites filles »Daniel Alexander 1980. Une froideur qui colle mal avec l’état affectif du modèle. Deux grandes photos en négatif de Crying donnent à voir le revers de l’image, son masque, son spectre. Avec la série « Questions », des fiches trouvées dans des poubelles, Anne Collier fait référence à l’art conceptuel et le jeu sur le langage, en donnant à ces questions une dimension métaphysique à travers une mise à distance et esthétisation extrême tout en insistant sur le caractère usé des supports. Enfin, le coffret de cassettes audio que l’artiste a certainement connu dans son adolescence intitulé « Introduction, Fear, Anger, Despair, Guilt, Hope, Joy, Love/Conclusion » d’aspect clinique et frontal, pointe le décalage entre contenu et contenant et le conditionnement absurde de nos sentiments féminins. La liste d’échéances à court et moyen terme est le summum de ces injonctions faites aux supers women « Things I Want To Accomplish » dans une approche typiquement capitaliste du temps. INFOS PRATIQUES : Anne Collier jusqu’au 25 mars 2018 Autour de l’exposition : • Conférence de Charlotte Gould, Anne Collier : façons de voir Jeudi 8 février à 18h30 • Projection -Cinéma « Les yeux de Laura Mars » Jeudi 15 février à 20h à l’Omnia (Rouen) FRAC Normandie Rouen 3 Place des Martyrs de la Résistance, 76300 Sotteville-lès-Rouen http://www.fracnormandierouen.fr/ Favori0
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